Un soir décisif (RP libre)

Si l'on fut dans l'ancien monde, Minuit aurait déjà sonné. Dans la rue, la vie des bistrots battait son plein : rires, chants, disputes... Le monde avait eu beau être chamboulé, les hommes conservaient quand mêmes leurs mauvaises habitudes. C'est au milieu de ces joyeux lurons qu'Heraldicus bouquinait sur une terrasse d'un bar à la clientèle plutôt calme, comparée aux autres concurrents de l'avenue. Lorsqu'il lisait, rien ne pouvait le perturber, mais il était quand même plus commode de s'afficher dans un établissement convenable pour ne pas avoir sur son dos les commérages de la concierge. Il stoppa un instant sa lecture pour commander un verre, la fraîcheur du soir hérissait ses poils, et une boisson chaude ne pouvait que lui faire du bien. En levant la tête -on se fait mieux entendre ainsi, marmonner dans son foulard n'est pas une éloge à l'éloquence, et bien s'exprimer lui permettait déjà de se distinguer de la masse des fêtards, d'ailleurs le serveur s'étonnait d'avoir encore un client sobre-, Heraldicus aperçut un homme qui ne venait pas habituellement dans le coin, avec une liasse d'affiches dans un bras. Peut-être était-ce un nouvel arrivant, mais sa curiosité détrôna sa raison, et se dirigea vers le mur où le curieux personnage avait placardé un de ses papiers.

X marchait tranquillement dans la banlieue, ses affiches sous le bras. Il recherchait du monde chez les hauts placés pour les assister dans leur travail. Lui même aurait bien besoin d'un assistant, gérer la grande librairie est une tâche plus ardue qu'il n'y paraît. Ce n'était pas dans ses habitudes de se promener dans les environs, mais sait on jamais, le personnel est partout et il se pouvait bien qu'un de ces gens bruyants soit à la recherche d'un emploi. Il colla une affiche sur le mur. Celle ci détaillait les différents postes dont on avait besoin. Il relue machinalement l'article qu'il avait lui même écrit.



Il détourna son regard de l'affiche, et poursuivit son chemin. Il ne lui restait plus qu'à faire la rue adjacente, et il pourrait rentrer. Il allait certainement d'abord passer une heure ou deux à la librairie, profitant de l’électricité des génératrices tant qu'il en est encore temps, pour faire des copies de certains ouvrages rares. C'était long et fastidieux, chaque pages doivent être scannées une à une, mais l'idée de perdre des livres uniques le dégoûtait encore plus. Un homme s'était dirigé vers l'affiche. Il le fixa un instant, se demandant si il devait aller lui parler ou non.

"Ce genre de proposition ne pouvait pas mieux tomber, pensa Heraldicus, travailler serait une bonne manière de s'occuper, de plus, la grande librairie est gérée par les Hauts placés, cela m'offrirait sécurité et tranquillité. Peut-être même auraient-ils des documents sur l'histoire de mon clan". Cette dernière pensée fut maîtresse de sa décision. De toute façon, il avait aisément remarqué que le poseur d'affiches l'avait repéré. La rue étant agitée et bruyante, il fit un léger signe de tête qui signifiait de le suivre, si cet homme était envoyé par la grande librairie, pour une demande si importante, il devrait sûrement être assez doué pour comprendre son appel. Il s'engagea donc dans une ruelle étroite, où la lueur des lanternes accrochées reluisaient sur les flaques au sol. Cependant Heraldicus prit rapidement conscience de son erreur. Déçu de voir la réalité des stéréotypes, il constata que les ruelles des quartiers malfamés n'étaient pas le paradis. En effet, quelques silhouettes douteuses le guettaient, même avec la plus grande discrétion du monde, on ne peut échapper à la perception d'un félin. Il expira, ces olibrius le mettaient dans l'embarras... Non pas car il serait incapable de se défendre,au contraire il ne rechignerait pas devant un peu d'exercice, mais parce que comme prévu, le poseur d'affiches lui avait emboîté le pas... Un autre détail cependant ne lui avait guère échappé, les flaques reluisantes au sol s'avérait être de l'essence... Ses agresseurs se trouvant dans la ruelle mais aussi sur les toits n'hesiteraient pas à sectionner les câbles ou pendent misérablement les lanternes, et Dieu sait combien cela l'indisposerait d'être en partie responsable de la mort d'un innocent, qui plus est envoyé par les Hauts placés... Peu de personnes ont survécu à un embrasement...

L'étranger lui fit un signe de tête, il voulait que X le suive. X hésita un instant, l'homme s'était engagé dans une ruelle secondaire qui ne lui inspirait rien de bon. Il revint néanmoins sur ses pas pour suivre l'homme. La lumière parvenait à peine dans la rue, comme absorbé par l'atmosphère malsaine de l'endroit. Seul de rares lanternes produisaient un éclat sinistre qui se reflétait sur le sol couvert de poisse. Une odeur nauséabonde lui chatouillait les sinus. L'homme s'était arrêté, il semblait regarder plus loin dans la ruelle, où plusieurs autres personnages aux airs douteux se trouvaient. L'odeur qu'il sentait rappelait quelque chose à X... De l'essence. Cela n'était pas bon signe. L'inconnue semblait l'avoir remarqué aussi, il avait l'air légèrement inquiet. Dans ces ruelles, on ne sait jamais ce qui peut arriver. La possibilité de se faire attaquer par les hommes plus loin avait traversé l'esprit de X. Bien qu'il soit capable de se défendre, il préférait ne pas prendre de risques. Premièrement, il était seul, à moins que l'autre ne décide de prendre part au combat. Et encore, il pouvait tout à fait se retourner contre lui. Peut-être l'avait il amener dans cette ruelle pour le piéger. C'était tout à fait possible. X choisi cependant de ne pas faire de conclusions hâtives.

« Vous vouliez me parler, n'est-ce pas ? Ne préfériez vous pas aller dans un endroit plus... Adapté ? »


Il attendit la réponse de l'étranger, il espérait sincèrement que celui soit favorable à sa proposition car l'inquiétude commençait à monter en lui. Elle monta encore plus quand les quatre hommes qui se trouvaient plus loin commencèrent à s'approcher d'eux. Celui qui marchait devant était grand et mince, et fumait une cigarette. Il la faisait rouler entre ses doigts après chaque bouffé, et laissait la fumée sortir de sa bouche sans vraiment la souffler, la laissant flotter autour de son visage. Si il lâche sa clope... Il valait mieux ne pas y penser. L'homme prit la parole.

"Hey! Vous là-bas? On se promène?"

Il avait un visage menaçant et ses amis, bien qu'on aurait plutôt dit ses gardes du corps, gloussait bizarrement.

"N'aies crainte, cher ami, je sens ton inquiétude... Je ne suis pas mauvais... Cependant nos chers hôtes ici présents ne sont pas des anges..." déclara calmement Heraldicus. En effet il avait parcouru le monde avant l'accident et sa mémoire se rappelait avoir croisé ce visage, cette odeur. À l'époque, il était à la botte d'un criminel qui n'est plus aujourd'hui, c'était un de ses premiers contrats.Le monde est petit... Il se rappelait avoir laissé fuir ses sbires, dont cet homme qu'il avait en face de lui aujourd'hui. D'ailleurs cet homme, derrière la fumée épaisse riait audacieusement. "Alors comme ça on s'est perdu dans la banlieue ? Votre maman ne vous a jamais appris à... ", le brigand avait peiné à finir sa phrase, évidemment, avec la jugulaire tranchée, cela était compliqué... Heraldicus venait de bondir, lame sortie, pour passer derrière le malfrat après lui avoir sectionné la gorge... Les rires stoppèrent net. Sans bouger, Heraldicus chuchota :"un triste homme qui n'a guère su profiter de sa vie... " pour ensuite lever le bras. Les autres hommes eurent une expression d'horreur sur leur visage, le mégot encore allumé du cadavre qui s'effondrait au sol allait heurter le sol noyé d'essence, seulement Heraldicus trop occupé à penser à sa mère -sans doute est-ce pour ça qu'il degaina sa lame si facilement, à cause de la remarque du bandit - ne prit gare à l'accident qui allait se produire... Mais le poseur d'affiches, lui l'avait remarqué et entama une course désespérée vers le mégot qui commençait sa chute...

Les événements prirent une tournure que X n'aurait pu imaginer. L'étranger venait juste de tuer un homme ! Pas le plus respectable d'entre eux, certes, mais un homme quand même. X aurait pu prendre le temps de montrer à quel point il était choqué si, en mourant plutôt violemment, l'homme en question avait perdu la faculté de tenir sa cigarette loin de l'essence. L'étranger ne l'avait pas remarqué, mais X avait commencé à courir la courte mais trop longue distance qui le séparait de cette maudite clope. Il n'allait pas y arriver. Elle était trop loin. Tout tournait au ralentit, ils étaient fichu. Soudain, comme un miracle, une idée, si vive et pourtant si pourtant si brillante, le traversa sans crier garde. Comme un geste instinctif, il sortit ses ailes et se jeta au sol, plumes en avant. Il lui fallut un moment pour se rendre compte qu'il était sain et sauf, la cigarette encore allumé tombée sur son aile étendu devant lui. Son cœur battait à cent à l'heure, l’adrénaline sans doute, et il rapprocha doucement, très doucement son aile de sa main, prit la cigarette et l'écrasa vigoureusement dans son poing. Il la serrait toujours très fort quand il prenait conscience de la situation. Il était tombé juste à coté du mort, et pouvait sentir ses plumes toucher légèrement le cadavre. C'était sans doute pour cela, mais aussi pour le fait qu'il soit allongé dans de l'essence mélangée à du sang, qu'il ne put réprimer une expression de dégoût.

« Aww. »

Il aurait bien voulu se relever, si à l'instant même un bruit particulier tilta à son oreille. Clic-Clac. Un des compagnons de la victime avait sorti son pistolet, et le pointait sans grands états d'âmes sur X. Celui ci avait tourné la tête et regardait son agresseur, toujours au sol.



« Et merde. »

"Fiouf... " souffla Heraldicus, les voilà désormais hors de danger. Ah ! C'était bien son genre d'omettre les "petits" détails lorsque l'on parlait de sa mère avec moquerie... Cependant, après ce court répit, il fallait s'occuper des autres nuisibles, ce genre de vermine n'a que faire de perdre son leader, ça fait plus de butin après tout. D'ailleurs, en parlant de vermine, Heraldicus avait constaté que les couinements des rats dans les poubelles avaient cessé, ou plutôt un bruit plus fort les avaient couvert, le bruit d'une arme à feu visiblement... "Encore des flemmards, quitte à se balader armé, autant avoir une belle arme blanche, fine, discrète, silencieuse, efficace... Ils n'ont aucun goût... " pensa Heraldicus, juste avant de se rendre compte que l'ancien tueur à gage et fervent admirateur de l'art du combat ancestral avait pensé pour lui. Bon, il fallait agir, et rapidement, cette histoire avait pris une ampleur bien trop importante, en plus le poseur d'affiches n'était pas n'importe qui, comme il l'avait pensé, tout le monde ne possède pas de si jolies plumes...

—"Eh toi !",déclara Heraldicus d'une voix sombre, "Je n'apprécies guère ta façon de remercier ce gars de nous avoir évité d'être éparpillés contre les murs... "

—"Ah ouais, t'apprécieras ptete mieux ma façon de t'exploser la cervelle !"

Bon, là c'est de trop, une arme de flemmard, un langage digne d'un gosse, Heraldicus bondit sur son bras pour le lui retourner dans le dos, et le lança contre le mur. Il tomba à terre, évanoui. Il y avait encore sept hommes dans la ruelle, en position de garde, la soirée s'annonçait mouvementée. Le poseur d'affiches s'était relevé.

"Ravi de te rencontrer, moins ravi des circonstances, mais trêve de bavardage, il y en a trois sur l'immeuble gauche, un sur celui de droite et trois en face, va t'occuper de celui en haut à droite, moi je prends ceux de gauche !" déclara Heraldicus. Ni une, ni deux, lui et l'emplumé se séparèrent. Le félin s'engagea sur l'échelle de service de l'immeuble gauche, il était suivi de deux gars qui leur faisait face tout à l'heure, lui et le poseur d'affiches. Le troisième du bas avait été tenir tête à son partenaire l'oiseau. Heraldicus avec célérité et adresse parvint à semer ses poursuivants quelques instants.Pour le moment, il se prit une flèche dans la doublure du manteau. Il comprit la plaisanterie de l'auteur du tir. C'était un gars qui habitait le quartier, il lui avait parlé quelques fois, sans plus, Heraldicus l'aimait pour sa maîtrise parfaite de l'arbalète. Quiconque pratiquait une activité touchant à l'art médiéval attirait l'attention de notre chat...Deux corps de brigands avec une flèche dans le crâne jonchaient le sol... Deux corps... Le troisième qu'il avait entendu était cet étrange personnage qui l'avait aidé à nettoyer la vermine. Ce dernier fit un signe de main avant de s'échapper en pointant les silhouettes présentes dans le dos d'Heraldicus. Le félin eut un léger sourire et se retourna en frappant le visage du premier poursuivant, qui s'étala ensuite sur son camarade qui l'avait suivi de trop près. Fin du second acte. Vraiment des néophytes ces malotrus. Heraldicus longa tel un funambule un câble électrique pour rejoindre l'autre toit de l'immeuble d'en face au cas où le poseur d'affiches serait en difficulté. soudain une rafale de vent souffla, et questionna Heraldicus sur sa provenance douteuse, ce qui lui fit oublier se s'aggriper au câble... Parfois réfléchir relève vraiment du stupide... Bon, espérons que cette chute ne soit pas mortelle, c'est pas vraiment glorieux comme fin...

Et un homme à terre, un. Le mec qui était sur le point d'abattre X à bout portant venait de rejoindre son camarade fumeur, grâce au félin. Sans attendre, X se releva, et jeta un coup d’œil autour de lui. L'étranger lui demanda d'aller « s'occuper » du brigand en haut de l'immeuble de droite. Bien que ce fut une mission inhabituelle, X ne prit pas vraiment le temps de réfléchir, la situation était déjà assez tendu comme ça et l’adrénaline pensait pour lui. Il rangea ses ailes, par habitude et empoigna l’échelle. Il montait rapidement, mais un des attaquants avait choisi de le suivre. Les autres s'occupaient du chat. Un fois arrivé en haut, X ne lui laissait pas le temps de s'enlever de l’échelle et lui donna un violent coup de pied en plein dans la figure. L'homme tomba et s'écrasa au sol, sans se relever. Bon. Je viens de tuer quelqu'un. X ne put pas réfléchir à la conséquence de son acte, le brigand qui l'attendait sur le toit l'attaqua sans attendre. Il était muni d'une dague, ou d'une machette, X ne s'y connaissait pas vraiment et le fait que son propriétaire la faisait valser en tout sens dans sa direction rendait l'analyse plus compliquée. Quoi qu'il en soit, X parvint à esquiver toutes ses attaques, sauf une qui le toucha à l'épaule. Il grimaça, mais profita de la baisse d'attention de son adversaire, si content d'avoir touché sa cible, pour lui subtiliser son arme. X resta un instant sans rien faire, surpris par sa propre action. Quand le gars se jeta sur lui, il enfonça la lame dans son abdomen. Je viens de tuer quelqu'un. Encore. Quand le cadavre tomba à ses pieds, il dégagea la vue et X put voir son allié se diriger vers lui. Il marchait sur un FIL. Un FIL. La prouesse était là, dans toute sa dangerosité. Il se déplaçait avec aisance. Cela aurait été spectaculaire si un coup de vent n'était pas venu le déséquilibré. Quelque chose bondit dans la poitrine de X. Le chat tombait tandis qu'il s'était mis à courir, encore une fois. Sans réfléchir, il se jeta dans le vide et ouvrit encore ses ailes. Tout passa tellement vite. Il avait réussi à attraper l'homme. Il avait réussi à ralentir la chute. Ses ailes avaient battu l'air si fort. Ils étaient au sol. Le félin semblait aller bien. X était encore dans la poisse. Tout les brigands étaient partis, ou morts, la rue était silencieuse. Pourquoi ne se relevait il pas ? Il lui fallut quelque instant pour se rendre compte que ce qui le gênait tant était une douleur foudroyante à son aile gauche.

« Argh...! »

Horrifié, il jeta un coup d’œil à la dites aile. Un angle étrange se dessinait là où il n'était pas censé exister. Ses plumes étaient tordu et X était presque sûr que c'était son sang qu'il sentait couler sur celles-ci. Il rangea ses ailes. Du moins, il essaya. C'était la première fois qu'il les blessait, et apparemment, il n'était plus en mesure de les faire disparaître.

« Oh non... Pitié... »


Il se redressa sur le mur. En bougeant, une nouvelle vague de douleur venait s'ajouter à la première, lui arrachant une autre plainte. Des larmes chaudes coulaient sur son visage, mais concrètement, il s'en fichait. Il en avait marre. Sa seule et bien maigre consolation était qu'il avait réussi à sauver l'autre mec et lui éviter toute blessure. Il aurait bien voulu lui demander comment il allait, mais son altruisme avait des limites. Il avait un os de brisé. Bien qu'infondé, la peur de ne plus jamais pouvoir ranger ou se servir de ses ailes comme il voulait l'envahissait. Il avait également peur de ne pas pouvoir rentrer chez lui sans attirer l'attention. Il avait peur parce qu'il avait tué deux hommes. Il était tétanisé. Quelle vie de merde....

Crac. "Mince... La chute m'a bien abîmé on dirait... Malgré le sauvetage de ce gars... C'est marrant pourtant, je ne sens rien... ", pensa en premier lieu notre funambule éphémère. Puis, en entendant son héros du jour gémir, il comprit que le son des os lors de l'impact venait de lui. Heraldicus était secoué, ses sens étaient tous excités, il voyait flou, et les auras qu'il percevait s'agitaient frénétiquement... "Ah, put... !", gloussa-t-il avant de reprendre forme humaine. Il considéra son camarade du regard... Avant de lui adresser la parole, en tentant de faire un peu d'humour pour atténuer la situation qui n'était guère joyeuse.

—"Poof... J'ai eu chaud, merci de m'avoir aidé, même si entre nous... Je serais tombé sur mes pattes !", tenta Heraldicus. Hum, pas de réaction, le félin était comme invisible, le gars était trop occupé à se demander ce qui lui arrivait visiblement... On va en tenter une autre. "Tu sais, d'ordinaire, les animaux de ton espèce, je les mange... ". Mouais, même celle-ci n'avait pas fait rire Heraldicus. On essaye une dernière fois... "De toute façon, je ne t'aurais pas mangé, car tu n'es pas un oiseau de mauvais augure.". Ouais, celle-là était souple, fine et recherchée... Mais toujours pas de réaction de la part du poseur d'affiches... Herald se demandait de plus en plus s'il était le seul à apprécier son humour... "Ah oui, au fait, si tu ne me trouves pas trop effrayant... Le poste est toujours d'actualité ? Tu pourras dire à ton patron que je suis passionné par les bouquins et que peu importe le salaire, du moment que je suis au calme pour bosser. Ce serait honorable de ta part. Pour ce qui est de ma dette envers toi... Je vais t'amener si tu le souhaites chez un ami qui pourra guérir tes ailes, pour ce qui est de l'épaule, je m'en changerais là-bas moi même, c'est une plaie de profondeur moyenne, faite par une lame de basse qualité, lame de dague visiblement, l'entaille est hésitante, le coup n'était pas voulu, du moins ce n'était pas ton épaule qui était visée... Ça se soigne facilement. Cependant, je peux comprendre qu'après tous ces malencontreux problèmes, tu refuses catégoriquement de me suivre, il est vrai que les circonstances actuelles ne font pas de moi une personne de confiance... Alors je te ramènerais sur la rue en demandant à quelqu'un de t'amener au poste de secours le plus proche avant de disparaître. C'est à toi d'en décider. "

Maintenant que le plus important était fait, et en laissant le temps au pauvre poseur d'affiches de donner sa réponse, Heraldicus se demanda comment avait-il pu perdre l'équilibre lors de sa traversée. Il se rappela la bourrasque, ses questionnements... Il était possible d'y réfléchir désormais en toute sécurité. Comment un violent coup de vent avait pu souffler ici, alors que les deux immeubles empêchent les flots d'air de valser ? Il reviendrait ici plus tard pour mener son enquête, en attendant aucun danger n'était imminent et le gars ailé s'apprêtait à donner sa réponse.

Mais qu'es-ce qui lui racontait ? Apparemment le gars essayait de faire de l'humour... X ne savait pas trop quoi répondre à ses vaines tentatives de détendre l'atmosphère. Il le laissa parler. Celui ci venait juste de lui rappeler pourquoi il était tombé dans cette galère en premier lieu. Alors ce mec était vraiment intéressé par son annonce. La perspective d'avoir enfin quelqu'un à qui il pourrait décharger un peu de son boulot lui remettait du baume au cœur. Il se releva péniblement, une grimace sur le visage. Il devait faire gaffe à ne pas bouger l'aile blessée, sinon il risquait d'avoir encore plus mal. Il était appuyé contre le mur, les yeux fermés. La douleur avait légèrement diminuée, et ses larmes avaient cessé de couler. Elles séchaient sur ses joues. Il réfléchit à la proposition. De toute façon, il ne pouvait pas juste retourner dans la grande rue, et si on l’amenait au poste de secours, ce qui était déjà assez gênant comme ça, on lui poserait des questions. Trop de questions. Et Peter serait au courant. Lola aussi. D'autres gens même, qu'il ne connaîtrait pas...De plus, il venait quand même de lui sauver la vie à ce gars... Ce serait vraiment un connard si il l'emmenait dans un nouveau merdier. Bien que soit tout à fait possible. Au pire, il lui cramerait la gueule et se sera bien fait. Sa décision était prise. Il soupira, et regarda l'homme. Celui ci ne semblait pas savoir qui il était, et le prenait pour un messager.

« Pour le poste, on verra ça à la librairie. C'est moi qui m'occupe des embauches, et de tout le reste d'ailleurs, je suis X Klayton. »

Oh, qu'est-ce qu'il aurait aimé être quelqu'un d'autre... Ses vêtement étaient plein d'essence et de sang, il puait et devait faire peur à voir. La bref vision d'une douche chaude le réconforta un peu.

« Mais d'abord, emmène moi à ton médecin, je ne vais pouvoir me trimballer comme ça dans la place publique... »

Note to myself : Une fois l'autre embauché, prendre son week end. L'autre. X ne connaissait toujours pas son nom.

« Avant... Je voudrais quand même savoir ton nom, c'est la moindre des choses. »


Il s'écarta du mur, et testa son équilibre. Ça avait l'air d'aller. Voyons... Il fit quelques pas. Bingo, il pouvait marcher.

"Mon nom est Heraldicus Flumine", déclara Heraldicus. Alors X Klayton, c'est ce gars. Le gars qui est arrivé dans les premiers dans ce monde pourri. Quel honneur... Mais c'est sûrement râpé pour le poste.Il pourrait encore être à ses petits soins pour espérer décrocher le job, mais vivre toutes ses journées ainsi le barberait, et puis, ce travail serait juste un passe-temps... "Non, on va jouer la carte du gars sympa et maladroit. Pfff, ça marchera pas j'ai tué un mec de sang-froid... Bon tant pis, je la fais au feeling, je verrais bien." pensa-t-il.

"Bon ok, voilà ce qu'on va faire, je vais t’emmener chez un gars très doué qui saura te guérir rapidement, seulement... Faudra pas le dénoncer, il utilise des techniques miraculeuses de soin mais il a horreur des pauvres abrutis qui viennent pour des égratignures, c'est pour ça qu'il fait ça chez lui. Je te demanderais, étant donné que tu es chez les Hauts-Placés, de ne pas révéler ses talents aux services hospitaliers de la ville. Il veut avoir la paix, en somme" annonça fermement Herald. Ethan avait été clair, si il lui ramenait un patient, il fallait que ce dernier se taise. Si en plus il lui ramenait Mr. Klayton, il valait mieux mettre les points sur les "I". C'est parti, le félin dit à X de le suivre, il ne ralentirait pas car dans la banlieue, il y a beaucoup de gens peu scrupuleux. Il entama une marche rapide en quittant la ruelle nauséabonde, tournant à de nombreuses reprises, enjambant tuyauteries, engageant quelques longements de murs parfois. "Enfin arrivés !" déclara Heraldicus devant un mur de briques au fond d'un cul-de-sac obscur. En effet, Herald était nyctalope sous sa forme féline, il y voyait comme en plein jour. Peut-être que ce n'était pas le cas de X, il n'y avait pas songé... De toute façon, une lueur soudaine apparut dans un bruit rauque lorsqu'il plaça sa main sur une des briques. Il s'avança dans le couloir d'Ethan. Les murs étaient tapissés avec une vieille parure des années 50, et un modeste mobilier en bois de chêne comblait le vide. Au fond du corridor se dressait une porte, où un écriteau disait :"entrez sans frapper" Heraldicus ouvrit la porte en faisant signe à X de le suivre. Deux secondes après avoir franchi le palier, Ethan, un homme très fin d'environ deux mètres de haut, vêtu d'une queue de pie, orné d'un haut de forme, rayonnait de joie derrière son monocle en voyant un de ses fidèles patients, avant de changer littéralement de visage à la vue de X Klayton, le X Klayton qui était haut placé parmi les Hauts-Placés ! Il s'écria " Pauvre idiot de chat de gouttière ! Je t'avais pourtant bien dit de ne pas m'amener n'importe qui !" puis, voyant X avec de méchantes blessures, lui demanda "Pour quelles raisons devrai-je vous soigner ?!"

Heraldicus ? X trouva son nom vraiment étrange et un peu précieux, avant de se souvenir que son propre nom ne volait pas haut non plus, et était peut-être pire. La description du docteur lui semblait un peu douteuse, mais au point où il en était, il n'était plus à un type louche près. Ne pas le dénoncer ? Comme si il voulait s'attirer encore plus d'ennuis... Il se tairait, du moment qu'il sorte vivant et légèrement en meilleure forme que maintenant. Même, vivant suffirait. Heraldicus le menait dans les ruelles sombres. X n'y voyait pas grand chose, mais son instinct suffisait à cerner la présence du gars. Il marchait vite, mais X réussissait à suivre l'allure. Enfin, lorsque le félin s'était arrêté devant le mur de brique, sa tête lui faisait affreusement mal, et le monde semblait pencher légèrement de gauche à droite. Il n'était pas plus surpris que ça lorsque qu'un passage secret apparu dans le mur, il voulait juste en finir et pensait déjà à rentrer chez lui. Ce qui le surpris plus fut l'apparence de la demeure du médecin. La façon dont Heraldicus lui avait décris l'homme l'avait mené à imaginer une tanière sombre, sale, douteuse. C'était très différent de cela, et l'homme le surpris encore plus. Les gens habillés d'une queue de pie et d'un monocle, ça ne court pas les rues... Mais l'apparence chic du type rassura X, peut être n'était il pas si mal tombé. Tout d'abord, l'homme sembla plutôt joyeux, jusqu'à ce qu'il se rende compte de la présence de X.

« Euh.... »

Bonne question, réponse un peu moins pertinente. Pourquoi le soignerait il donc ?

« Tout d'abord, je tiens à m'excuser platement pour le dérangement... La journée ne s'est pas vraiment passé comme je l'avais prévu. »

Il voyait flou. Combien de temps avaient ils marché ? Son sang coulait toujours, ça devait être pour ça. Il aurait du faire un garrot, ou un truc du genre. Ses jambes se dérobèrent brusquement, l'obligeant à s'appuyer au mur. Un miroir était accroché, il put voir son reflet. C'était pas beau à voir. Il avait de l'essence sur le visage, et était étrangement pâle. Vraiment pâle.

« Désolé de salir vos murs... »

Il prit une grande inspiration, tout en luttant pour rester debout.

« Je... Mes ailes, normalement je peux les faire disparaître... Mais apparemment, je me suis cassé un os et... »

Tout devint encore plus flou. Il cligna des yeux pour faire revenir sa vision.

« C'est... réparable... ? »

Il comprendrait parfaitement que le toubib ne veuille pas s'occuper de lui, d'autant plus qu'il venait juste de laisser une traîné de sang sur la tapisserie. Il jeta un regard désespéré à Heraldicus. Mais pourquoi tout bougeait autant ?

Lorsque X entendit le nom d'Heraldicus, ce dernier remarqua qu'il eut une réaction. C'était sans doute parce que son nom n'était tout bonnement pas courant, mais l'idée que X ait entendu parler de son passé le perturba. Encore ce passé qui resurgissait, il eut un souvenir soudain de sa maison d'enfance en flammes, de sa famille gisant au sol, de l'horreur qui avait éprouvé ce jour-là... Cependant le bruit que fit la chute de X contre le plancher le ramena à la réalité. Il fallait le soigner, et vite. Il avait perdu beaucoup trop de sang. "Albus, vite, c'est moi qui te demande de le guérir, je t'en prie !". Albus. Il l'avait appelé Albus et ça n'avait guère plu au médecin. "Oh, ça va, ils est dans les vaps, il a rien entendu ! Allez fais quelque-chose bon sang !" s'écria Heraldicus. Le docteur avait changé d'humeur. Désormais il était sombre et concentré. Il demanda à Herald de lui amener X inanimé sur la table. Il saisit sa trousse et en sortit du matériel chirurgical. Il prononça clairement ensuite au félin d'aller chercher dans le frigo deux perfusions. Quand il fut revenu avec, il commença à opérer X. Albus au milieu de l'intervention eut un étonnement particulier: "Cet enfant n'est pas normalement constitué... Aurais-je l'honneur d'ausculter un demi-dieu ? Hum, je ne vais pas avoir le choix visiblement " puis, sortant de ses pensées, finit son travail.

Deux heures plus tard, dans la nuit claire, X reprit conaissance. Ils étaient dans la chambre du vieillard. Heraldicus qui lisait vit que X venait de s'éveiller. Il lui posa donc les questions qu'Albus avait demandé avant de partir vers le centre-ville.

"Ha, te voilà réveillé. Tu vas bien ? Ethan fait des miracles, normalement tu n'auras pas mal, d'après lui. Il y a juste eu... Un hic lors de l'intervention. Ahem, je lui ai raconté notre contretemps et d'ordinaire les hommes-harpies... Ne volent pas. Même si on a drôlement chuté et que tu n'as pas battu des ailes, il a eu la curiosité... D'admirer ton fonctionnement intérieur... Et il affirme que tu n'es pas qu'un hommes-harpie. Il m'a missionné de te demander si tu étais au courant de ce que tu étais, et si tu savais utiliser tes capacités à 100 %. Là, il est parti à la place publique, pour chercher au centre médical du matériel adapté à ta condition physique, car son art a... Été inutile face à ton état, il lui faut des assistants et des outils plus sophistiqués pour te guérir en totalité. Sache que tu as grand intérêt pour lui, car il ne voulait pas se présenter au centre médical, il n'avait pas envie de se mélanger... Aux médecins qui ne comprennent rien à son art... Sacré Albus... Euh Ethan pardon... Il est d'une incroyable efficacité, cependant il a des techniques peu orthodoxes de soin... Dès que tu auras mangé un morceau, pars te reposer chez toi, il a replié ton aile mais tu ne peux pas t'en servir, pour cela il faudra que tu le rejoignes quand tu auras repris des forces au centre médical. Et, pendant ce temps je m'occuperai de la librairie, ne t'en fais pas"

Tout était devenu trouble, et il avait sombré dans l'inconscient comme on aurait sombré dans une mer trop sombre et trop profonde. De temps en temps, il lui semblait apercevoir quelqu'un à ses coté, ou distinguer la masse sombre qu'était ses ailes, mais dans l'ensemble il nageait dans un océan que seul les endormis peuvent arpenter.

Il lisait. Du moins, il rêvait qu'il lisait. Il n'arrivait pas à se rendre compte de quoi. Le bruit des pages qui se tourne sonnait étrangement réel. Finalement, il ne lisait pas. Il avait les yeux fermé, et semblait être allongé. Mais le bruit des pages était toujours là. Petit à petit, il s'extirpait de son sommeil pour revenir à la réalité. Il avait mal à la tête et la bouche pâteuse. Il cligna des yeux. Tout était redevenu net assez rapidement. Il était dans une pièce qu'il ne connaissait pas. Un homme lisait à ses cotés. Il le connaissait... Heraldicus. Tout les souvenirs lui revirent en mémoire, tandis qu'heraldicus lui racontait ce qui s'était passé. Admirer mon fonctionnement intérieur? Un homme-harpie? Bien sûr qu'il n'était pas un homme harpie, il le savait déjà depuis longtemps. Mais...

"Admirer quoi...? Il n'était pas censé juste..."

Ses ailes avaient disparus. Comment le docteur a il pu les rentrer? Lui même ne savait pas trop comment il faisait. Toujours est il qu'il ne souffrait plus, pas la peine de chercher plus loin. Enfin... IL essaya tout de même de les faire réapparaître, en vain.

"Tu sais quoi? C'est pas grave, après tout il m'a soigné et c'est ça qui compte. Et oui, je sais ce que suis, non je ne sais pas si je peux utiliser mes capacité à 100 pour cent, mais à vrai dire je m'en fiche un peu."

IL fouilla dans ses poches, et sorti deux billets de vingt. Son travail, bien qu'il soit placé haut dans la hiérarchie, ne lui rapporte pas tant que ça et c'était tout ce qu'il pouvait donner au docteur pour le moment. Il les posa sur une petite table à coté du lit.

"Pour les frais de soin, ce n'est pas grand chose mais c'est déjà ça... Tu lui diras merci de ma part? Et je te donne rendez vous demain 13 heures à la librairie."

Il se leva du lit.

"Merci pour tout, je ne sais pas ce que j'aurais fait sans toi... A demain."

Et il sortit dans la nuit, rêvant à son propre lit qui l'attendait et ressassant les événements plus que mouvementé de la journée. Ou de la veille, il ne savait pas vraiment quelle heure il était.

-fin du rp pour moi-